Épisode 86

Le bégaiement masqué : qu'est-ce que c'est ? - avec Anny Dubé

Écoute L'orthophonie simplement sur
Lorianne Lacerte - Icône - Apple podcastÉcouter sur GoogleÉcoutez sur Spotify

As-tu déjà entendu parler de l’écrivain Charles Lutwidge Dodgson ?

Si la réponse est non, ce n’est pas surprenant ! En fait, lors de la publication de ses histoires (comme la célèbre « Alice au Pays des Merveilles »), cet écrivain a choisi d’adopter « Lewis Carroll » comme nom de plume.

Pourquoi ?

Eh bien, c’était pour séparer sa carrière d’auteur de sa profession d’enseignant et de mathématicien.

Plus récemment, la chanteuse britannique Sia et le duo français Daft Punk sont eux aussi connus pour avoir pour ainsi dire « porté un masque », au moins pendant un certain moment. 

Et à ce jour, l’identité de « Satoshi Nakamoto », nom inventé pour désigner les créateurs du Bitcoin, reste un mystère.

Bon, tu comprends le principe. Masquer notre identité ou une partie de notre identité, ça ne date pas d’hier.

Mais avant de discuter avec Anny Dubé, orthophoniste spécialisée en bégaiement, je n’avais jamais entendu parler de l’un de ces masques : le bégaiement masqué. 

Notre discussion était super enrichissante, et je suis vraiment excitée de partager avec toi ce que j’ai appris sur le bégaiement masqué et comment on peut tous être des alliés pour ceux qui le vivent.

Alors, prête pour l’aventure ? 🚀

Le bégaiement masqué, c’est quoi ?

La réponse est simple, et le terme le dit de lui-même : le bégaiement masqué, c’est le fait d’enfiler un masque pour cacher son bégaiement. La personne fait comme si de rien n’était, en essayant de se comporter comme quelqu’un qui ne bégaye pas. 

Des fois, ça peut vouloir dire que la personne va carrément éviter de parler dans certaines situations. 😶 

Si elle sent que le bégaiement veut se pointer le bout du nez, la personne va peut-être aussi changer de mot ou esquiver certains sons.

Évidemment, tous ces petits détours, ça maintient la personne dans une sorte d’alerte constante 🚨, toujours sur le qui-vive pour ne pas être perçue comme quelqu’un qui bégaye. 

Mais tu sais quoi ? Le bégaiement masqué, même dans la communauté des personnes qui bégayent, c’est encore assez méconnu. Et pourtant, d’après Anny, environ 15 % des personnes qui bégayent vivent avec cette version « masquée » du bégaiement.

Masquer son bégaiement, est-ce que c’est une décision consciente ?

Bonne question, hein ? 😏

Avant d’y répondre, on doit préciser que dans cet épisode, on parle surtout du bégaiement qui commence pendant l’enfance, et pas d’un bégaiement qui est acquis après un accident ou à cause d’un médicament. (Anny m’a vraiment appris de quoi, là… Je ne savais pas du tout qu’on pouvait commencer à bégayer tout d’un coup comme ça ! 😲) 

Mais, en règle générale, la plupart des cas de bégaiement se manifestent avant l’âge de 5, 6 ou 7 ans. Et très vite, les enfants se rendent compte que le bégaiement, ça ne passe pas super bien aux yeux de certains. 😕 Même les proches, avec toute leur bonne volonté, peuvent malgré eux faire sentir à l’enfant que sa manière de parler n’est pas celle qu’on attend.

Résultat ? L’enfant essaie de s’ajuster, de parler d’une autre manière. Mais là, il peut se rendre compte que son système moteur ne veut pas suivre, et qu’il bégaie quand même. Donc, l’enfant va commencer à élaborer des stratégies pour masquer son bégaiement, pour éviter de « décevoir ». Et souvent, ce n’est même pas quelque chose dont il est conscient.

On pourrait dire que ça se fait instinctivement, comme un réflexe. Si l’enfant sent que montrer son bégaiement pourrait lui causer des ennuis, il trouve naturellement des moyens de le cacher. 

À la fin de la journée, on est tous des humains, hein ? Et ça, c’est une réaction humaine tout à fait naturelle. 

Comment devrait-on percevoir le bégaiement ?

L’inclusion, la diversité, et l’égalité, ça concerne aussi les façons de communiquer. 

Donc, quand elle parle de bégaiement, Anny aime bien dire « différence » plutôt que « trouble ».

Parce que, au final, le vrai trouble, c’est peut-être plus les gens qui mettent des bâtons dans les roues des personnes bègues à cause de leur façon de s’exprimer, et non le bégaiement comme tel.

Penses-y un peu… Si on vivait dans un monde où la norme, c’est de prendre son temps, d’apprécier les silences, d’écouter vraiment... Là, le bégaiement ne serait plus un obstacle, non ?

Vraiment, c’est l’environnement qui crée les barrières. 🚧

Et là, un gros mouvement est en cours, surtout porté par les personnes qui bégayent elles-mêmes, clamant haut et fort : « On a le droit de bégayer ». 

Alors, comment on se positionne vis-à-vis des attentes qu’on a envers les enfants ? Anny, de son côté, croit qu’on peut tous apprendre à se concentrer sur ce qu’ils ont à dire, plutôt que sur comment ils le disent 💬.

Mais, en tant que parents ou adultes, on a aussi la responsabilité d’aider les enfants à s’épanouir au maximum. Donc, on fait quoi ? On laisse un enfant bégayer librement, ou on intervient pour peut-être réduire le bégaiement à l’avenir ?

Les débats sont super intenses en ce moment, surtout en ce qui concerne les plus jeunes, qui ne peuvent pas vraiment verbaliser leurs volontés. Les ados et les adultes peuvent décider par eux-mêmes s’ils veulent travailler sur leur façon de parler, mais pour les petits, c’est une autre histoire. 

Présentement, c’est une grande question : intervenir ou laisser aller pour que l’enfant choisisse plus tard si c’est quelque chose qui le dérange ? Et là, si on laisse aller et qu’on attend à plus tard, est-ce que le bégaiement sera tellement installé et sévère que l’intervention sera moins efficace qu’elle l’aurait été des années plus tôt ?

Ouais. Tout un débat. 😅

D’ailleurs, je me suis moi-même placée au beau milieu de ce débat (involontairement, bien sûr), il y a quelques mois. Dans la saison 2 de L’orthophonie simplement, j’ai été vraiment touchée par une entrevue que j’ai réalisée avec une maman, Crissy Mercier Garand. Crissy a soutenu ses enfants pendant leurs interventions en orthophonie pour le bégaiement, et elle était tellement soulagée et heureuse des progrès réalisés. Son témoignage était plein d’espoir : grâce à l’orthophonie, ses enfants avaient complètement arrêté de bégayer.

Mais ce partage a suscité des réactions inattendues au sein de la communauté des personnes qui bégayent. 😮 Certains m’ont fait remarquer que l’objectif n’était pas forcément de s’aligner sur un « standard » de parole, mais plutôt d’embrasser cette différence comme une autre forme de communication. 

Et pour être bien honnête, cette perspective m’a déstabilisée. Jusque-là, dans toute ma vie, j’avais perçu le bégaiement principalement comme un obstacle à la communication, et non comme une simple variante de l’expression orale.

Disons que ces commentaires ont ébranlé mes convictions. Pourquoi considérer systématiquement le bégaiement comme une difficulté à surmonter, plutôt qu’une différence à accepter ? Et pourquoi mettre cette pression aux personnes bègues pour qu’elles se rapprochent d’une parole fluide qui répond aux standards ?

Plus j’y pensais, plus je ne comprenais pas pourquoi je n’avais pas toujours vu les choses comme ça. 😅

Maintenant, je suis fière de dire que oui, le bégaiement peut être vu comme une différence. Mais je comprends aussi le point de vue des parents qui souhaitent intervenir, surtout dans un monde dominé par des normes de communication strictes.

Bref, cette discussion semble bien vivante au sein de la communauté des personnes qui bégayent, mais je ne suis pas sûre qu’elle résonne autant en dehors. Les standards dominent encore, et lorsque la parole d’un enfant s’en écarte, il semble y avoir une tendance à penser que ce serait mieux de « corriger » la situation. 🛠️

Mais quelle est la meilleure solution ?

C’est une question complexe, sans réponse évidente. Au bout du compte, c’est la décision des parents.

Même les orthophonistes peuvent bégayer !

Dans la vie, pas mal rien n’est tout noir ou tout blanc 🌓. 

Anny m’a expliqué que le bégaiement est commun dans sa famille : ses deux parents et elle-même ont leur propre expérience avec ça. En fait, Anny a longtemps caché son propre bégaiement, même durant ses études en orthophonie 🤫. 

Donc, quand sa fille de 4 ans a commencé à bégayer, ça l’a profondément affectée 😟. Consciente du fort facteur génétique, elle craignait que le bégaiement ne persiste. Anny a donc sollicité l’aide d’une amie orthophoniste pour confirmer la nécessité d’une intervention. Ensemble, Anny et son amie ont choisi la méthode Lidcombe, réputée pour son efficacité à l’époque. 

Le résultat ? Sa fille ne bégaye plus. 

Choisir d’intervenir n’était pas facile, mais Anny se sentait prête grâce à son expérience dans le domaine. 

Et bien sûr, Anny est reconnaissante pour des approches efficaces comme la méthode Lidcombe. 

Mais si sa fille avait continué de bégayer, elle aurait souhaité qu’elle embrasse sa différence, sans se cacher, et qu’elle sache répondre aux moqueries.

Par contre, dans sa vie professionnelle, travailler avec des familles confrontées au bégaiement rend Anny nerveuse. Elle ne sait pas trop sur quel pied danser, et elle ne veut surtout pas imposer ses choix aux autres. 

Parce que oui, la méthode Lidcombe peut être très efficace, mais elle implique de donner un feedback sur la fluidité de l’enfant. 

Par exemple, si l’enfant parle sans bégayer, l’orthophoniste qui utilise la méthode Lidcombe va dire à l’enfant : « Wow, il n’y avait pas de bosse quand tu as parlé ! C’était très fluide. Bravo ! ».

Mais cette méthode amène aussi l’orthophoniste à interroger l’enfant sur sa perception de sa propre parole (« penses-tu que c’était fluide ? »). Et si un bégaiement survient, l’orthophoniste va inviter l’enfant à se reprendre, à essayer de reformuler sa phrase sans bégayer.

Évidemment, c’est un peu délicat, tout ça. Le risque avec cette méthode, c’est que l’enfant en vienne à penser que sa manière naturelle de parler est inadéquate. 

Donc, une question se pose : comment adopter une telle approche sans nuire à l’estime de soi de l’enfant ? 

Pas évident. 😅 

D’un côté, l’absence d’intervention peut laisser le bégaiement s’installer durablement. De l’autre, une intervention mal vécue peut laisser des séquelles émotionnelles profondes. 

Qu’en est-il d’un enfant qui ne semble pas être conscient de son bégaiement ? On lui en parle, ou on fait comme si de rien n’était ?

Laisse-moi te parler d’une petite cocotte d’environ 4 ans que j’ai rencontrée en milieu de garde. Pour le fun, on va l’appeler Maéva.

Maéva, elle a un bégaiement sévère. Mais cette p’tite-là, elle en déplaçait, de l’air. 😱 Elle avait tellement de jasette ! 

Moi, dans mon rôle, j’ai fait de mon mieux pour m’adapter, pour lui donner tout l’espace dont elle avait besoin. Et franchement, Maéva semblait ne pas du tout se rendre compte de son bégaiement. Et si elle en était consciente, ça ne l’empêchait surtout pas de parler.

Donc, j’étais un peu embêtée. Je me demandais : « Je lui en parle ou pas ? ».

La dernière chose que je voulais, c’était de donner à Maéva l’impression que sa manière de parler n’est pas « normale ». 

Mais la réalité, c’est que tôt ou tard, l’enfant qui bégaie va finir par s’en rendre compte (si ce n’est pas déjà le cas).

Alors, non, ça n’a pas besoin d’être un sujet tabou ! 

Ce que j’aurais pu dire à Maéva, c’est « Wow, c’est génial que tu ne te laisses pas arrêter par ça, continue ! ». Et même, j’aurais pu préparer le terrain pour qu’elle reste forte, même si un jour, quelqu’un se montre méchant avec elle.

En parler, ça peut juste aider, surtout si on veut vraiment comprendre comment l’enfant vit son bégaiement.

Les parents ont leur mot à dire, of course. Ils peuvent décider de travailler sur la fluidité avec une orthophoniste. C’est leur droit. Mais dans une perspective d’inclusion et de reconnaissance de la neurodiversité, choisir de ne pas intervenir pourrait être tout aussi valable. Surtout si l’enfant n’a pas de souci de communication comme tel, juste une manière de parler qui lui est propre… Et c’était le cas de Maéva. 😊 

C’est fou, mais un article scientifique est sorti il n’y a pas si longtemps, avec 4 experts en bégaiement qui se demandaient si on devrait intervenir ou non chez les tout-petits. Surtout que jusqu’à 5-6 ans, beaucoup d’enfants s’en sortent seuls…

Mais qu’est-ce qu’on fait pour ceux qui auraient besoin d’un coup de pouce ? 

Un des chercheurs disait que le cerveau des enfants qui bégayent est différent dès le départ, et que pour certains, aucune intervention ne changera ça. Certaines personnes diraient donc qu’intervenir, c’est aller à l’encontre de l’acceptation de la neurodiversité. 🤷‍♀️

Au final, c’est aux parents de décider, en fonction de leurs valeurs et des risques qu’ils sont prêts à prendre. 

Et c’est super important pour les parents d’être conscients qu’ils ont des options. L’intervention, ce n’est pas obligatoire.

Qu’est-ce qui peut t’indiquer si le bégaiement de ton enfant risque d’être persistent ou non ?

Parfois, les enfants vont connaître un bégaiement transitoire, qui va se résorber tout seul. D’autres fois, le bégaiement s’installe et, sans intervention (ou même, dans certains cas, malgré les interventions), il va durer pour la vie.

Alors, est-ce qu’il y a un moyen de savoir dans quelle catégorie se trouve ton enfant ? 🤔

Oui et non.

En fait, rien n’est une garantie absolue, mais certains facteurs peuvent quand même te donner un petit heads-up que le bégaiement de ton enfant pourrait durer dans le temps. 

En voici 2 :

1. Le facteur génétique

L’un des facteurs le plus importants à savoir, c’est le facteur génétique.

Parce que oui, le bégaiement, c’est une affaire de famille.

Si tu as des personnes bègues dans ta famille et que ton enfant commence à bégayer lui aussi, c’est très possible que le bégaiement de ton enfant ne sera pas transitoire.

Et face à ça, chaque famille va agir différemment.

Certaines vont se dire : « Hey, mes cousins ont tellement souffert de leur bégaiement… Je vais tout faire pour que mon enfant arrête de bégayer ». 

D’autres vont se dire : « Tu sais quoi ? Le bégaiement, ça fait partie de notre famille, et sûrement que dans les prochaines générations, il y aura encore des personnes qui bégayent. Nous, on a l’opportunité de leur rendre la vie plus facile et de montrer à tout le monde qu’on ne se laisse pas arrêter par ça. » 💪

Est-ce qu’une façon de réagir est meilleure que l’autre ?

Non.

Vraiment, c’est une question personnelle et chaque point de vue est valide.

2. Le type d’hésitations

Un autre facteur à considérer, c’est le type d’hésitations que fait ton enfant.

En fait, c’est possible qu’il ne bégaie même pas ! 🤯

Je t’explique : tout le monde peut buter sur des mots, se reprendre ou bloquer sur une idée. Mais le bégaiement, c’est une autre paire de manches. On parle de « ré-ré-répétitions » de sons ou de parties de mots, de « prrrrrolongements » de sons, et de blocages (ex. rester bloqué sur le son « mmmmm »). Ces moments-là, ce ne sont pas des hésitations du genre « je ne sais plus quoi dire, je cherche mes mots ». 

Non, pas du tout. 

La personne sait très bien ce qu’elle veut dire, mais elle vit un blocage au niveau moteur.

Ça, c’est du bégaiement.

C’est du bégaiement parce que ça brise le flow des paroles d’une manière bien précise, et ça nous donne un indice que ça pourrait bien s’installer pour de bon.

Quand c’est juste des « euh » ou des « ben », ou qu’on répète une phrase parce qu’on essaie de rassembler nos idées, c’est ce qu’on appelle des disfluences normales. Ça arrive souvent aux enfants qui ont un million de choses à dire mais qui ne trouvent pas toujours comment les exprimer clairement. Et puis, il y a les répétitions de mots entiers, comme « là, je suis allée, là, je suis allée chez ma grand-mère. » 

Ces trucs-là, c’est ce qu’on voit dans la parole de tous les jours.

Donc, si ton enfant a réellement un bégaiement et pas juste des hésitations normales, c’est un autre signe que ça va peut-être durer dans le temps.

4 impacts potentiels du bégaiement masqué dans la vie d’une personne

Maintenant, je vais te parler de 4 impacts majeurs que le bégaiement masqué peut avoir sur la vie de quelqu’un. Attache-toi, on entre dans le ❤ du sujet !

1. Anxiété et évitement

Récemment, Anny a entendu parler d’un homme (on va l’appeler Jacques) qui n’écrit pas les vraies choses lorsqu’il facture ses clients. 

Jacques, c’est un fraudeur ?

Non, pas du tout. 🤣

En réalité, les mots que Jacques devrait écrire sur ses factures, ce sont des mots sur lesquels il bloquerait. Pour éviter de bégayer, Jacques les remplace donc par des synonymes. Comme ça, quand il rencontre ses clients et explique la facturation, il risque moins de bégayer.

Imagine ! Le bégaiement, c’est fort, hein ?! 😰

Des choses simples de la vie, comme appeler chez le dentiste ou commander une poutine au resto, ça peut devenir une grande source d’anxiété pour les personnes qui bégaient. Pour ne pas vivre ça, certaines personnes décident donc d’éviter toutes ces situations. Si tu ne parles pas, tu ne peux pas bégayer, right ?

Mais ça, ça crée un cercle vicieux : moins tu t’exposes à tes peurs, plus elles finissent par te stresser.

2. Choix des prénoms

L’an dernier, j’ai eu la chance de jaser avec Isaël Morin, un entrepreneur qui vit aussi avec le bégaiement. Il a passé des années à le cacher avant de décider d’en parler ouvertement. Isaël m’a confié que le plus difficile pour lui, c’était de dire son propre prénom. Parce que, t’sais, on ne peut pas vraiment contourner ou remplacer notre prénom par un synonyme. C’est ton nom, point final.

Isaël m’a même mentionné qu’à cause de ça, certaines personnes bègues choisissent de changer de prénom.

Mais tu sais quoi ? 

Souvent, ces personnes se remettent à bégayer en disant le nouveau prénom. 😅

Anny, pour sa part, confie que le choix des prénoms de ses enfants a carrément été influencé par son bégaiement. Elle a vraiment senti que ça jouait dans sa décision. 

Et évidemment, Anny n’est pas la seule à rapporter ça.

3. Choix de carrière

Le bégaiement, ça peut carrément orienter les choix de vie d’une personne, surtout quand c’est le temps de choisir une carrière. 

Pour te donner une idée, Anny elle-même a mis une croix sur son rêve de devenir enseignante. Le défi de parler devant une classe, avec son bégaiement, ça lui semblait insurmontable. Alors, elle a opté pour une formation en sciences environnementales, un chemin complètement différent.

Et ce n’est pas la seule qui a fait ça. Beaucoup de personnes bègues se retrouvent à faire des choix similaires. Elles évitent carrément les jobs qui demandent beaucoup de communication orale, pas parce qu’elles n’en sont pas capables, mais parce qu’elles veulent éviter l’anxiété que ça provoque. Elles se disent qu’elles seront plus à l’aise, et peut-être même plus heureuses, dans des rôles qui les « exposent » moins.

C’est un peu comme naviguer avec un compas qui nous pousse toujours à choisir la route la moins houleuse, même si ça veut dire qu’on va rater les beaux paysages… 😥

Heureusement, Anny est maintenant à l’aise avec son bégaiement et elle affirme qu’elle a tout à fait le droit de bégayer. 

En fait, elle voit même les côtés positifs que le bégaiement a apportés dans sa vie. 

Par exemple, Anny est convaincue qu’elle n’aurait jamais choisi le métier d’orthophoniste si elle n’avait pas elle-même bégayé. Et elle ADORE son métier ! 🤩 Ça lui donne une façon d’être utile pour les autres, ça lui permet de connecter avec des gens qui vivent des expériences similaires à ce qu’elle a vécu… Ça donne un sens à sa vie. 

Et si elle pouvait appuyer sur un bouton magique pour faire disparaître son bégaiement, elle ne le ferait pas. Elle ne le ferait pas, parce que ça fait maintenant partie de son identité.

Mais Anny n’oublie pas les jours où, plus jeune, elle aurait donné n’importe quoi pour que son bégaiement disparaisse.

Elle le dit bien : « Ce n’est pas parce que je vis bien avec mon bégaiement maintenant que si j’avais eu le choix, je ne l’aurais pas enlevé quand j’étais plus jeune. »

4. Qualité de vie

Récemment, Anny est tombée sur quelque chose de vraiment captivant. Elle a découvert des études fraichement publiées qui examinent comment le bégaiement affecte la qualité de vie. 

Eh bien, apparemment, l’impact du bégaiement sur la vie des gens serait aussi lourd que celui d’un cancer ou d’une maladie cardiovasculaire. 😯

Alors, imagine un peu le poids que ça représente pour ceux qui vivent avec un bégaiement masqué. Ça peut pousser certaines personnes à traverser des moments de détresse psychologique vraiment intenses. 😔

Comment agir lorsqu’on parle avec une personne qui bégaie ?

Si tu te trouves face à quelqu’un qui bégaie, le mot d’ordre, c’est l’écoute. Offre-lui l’espace nécessaire pour s’exprimer et concentre-toi vraiment sur ce qu’il dit. 

Autrefois, on évitait de parler du bégaiement avec les tout-petits, pensant que ça pourrait les stresser davantage. Aujourd’hui, on sait que discuter ouvertement du bégaiement, c’est bénéfique, même si c’est souvent difficile pour la personne concernée d’aborder le sujet elle-même. La société nous bombarde d’idées reçues, comme le fait que les personnes qui bégaient seraient moins douées pour communiquer ou seraient naturellement timides, ce qui ne rend pas les choses plus faciles.

Mais en parler franchement, c’est une bonne approche. 

Chez les cocos de 2 à 4 ans, qui montrent parfois leur frustration en se tapant sur la bouche, on peut aussi aborder le sujet doucement : « Tes mots restent coincés et ça te fâche un peu, hein ? ». Juste montrer qu’on est là, à l’écoute, ça compte énormément.

De plus, laisser la personne qui bégaie te guider sur la manière dont elle souhaite être écoutée peut faire toute la différence. Tu peux lui demander : « Est-ce que je peux faire quelque chose de spécifique pour te rendre plus à l’aise quand on se parle ? ».

Parce que souvent, face à quelqu’un qui bégaie, ceux qui n’ont jamais vécu ça se demandent comment réagir. (Avant de jaser avec Isaël Morin et Anny, c’était un peu mon cas. 😅)

Et chaque personne est différente, donc chaque personne qui bégaie a des préférences différentes.

Par exemple, certains pourraient préférer qu’on garde un bon contact visuel avec eux pour ne pas avoir l’impression que ce qu’ils disent n’a pas d’importance. D’autres pourraient devenir plus anxieux quand on les regarde dans les yeux.

Aussi, on entend souvent de ne pas terminer les phrases de quelqu’un qui bégaie. Mais Anny, elle, apprécie quand quelqu’un l’aide à finir ses phrases. Pourquoi ? Parce que ce qui la dérange le plus dans son bégaiement, ce n’est pas le blocage en soi, mais la tension physique qui l’accompagne. C’est cette sensation d’inconfort, de pression, comme si elle suffoquait. Ses muscles se tendent, se relâchent, se tendent… C’est un cycle épuisant.

Alors, quand quelqu’un prend le relais et termine sa phrase, ça soulage un peu Anny de cette tension. 

Par contre, elle sait que d’autres personnes qui bégaient peuvent se sentir diminuées si on termine leurs phrases. Elles pourraient voir ça comme une forme d’infantilisation ou une preuve qu’on ne les écoute pas vraiment.

C’est pourquoi la communication ouverte est si cruciale. Demande à la personne avec qui tu parles ce qu’elle préfère. « Est-ce que ça t’aide si je finis tes phrases ou préfères-tu que j’attende ? » 

Bref, ne suppose pas que tu sais ce qu’il y a de mieux pour une personne qui bégaie. En fin de compte, comprendre et respecter les besoins individuels peut grandement améliorer la conversation et renforcer le lien entre toi et la personne concernée.

Une chose à éviter, par contre, c’est de dire des phrases du genre : « Mais non, tu ne bégaies pas tant que ça ». 

Oui, la personne qui bégaie peut comprendre que de ton point de vue, le bégaiement ne bousille pas tant la communication entre vous 2. Mais ça ne veut pas dire que ce n’est pas quelque chose qui est désagréable à vivre pour elle et qui prend beaucoup de place dans sa vie. 

En fait, des phrases comme ça, c’est ce qu’on appelle des « micro-agressions ». Les gens veulent bien faire et vont essayer de dire quelque chose qui se veut supportant et rassurant… Mais au final, ce qu’ils disent, c’est plus blessant qu’autre chose. 😥

Conclusion de la chose : on ne parle pas assez du bégaiement !

Vraiment.

On n’en parle vraiment pas assez.

Chez les tout-petits (entre 2 et 5 ans), environ 75 à 80 % d’entre eux vont traverser une phase où ils bégayent. La bonne nouvelle, c’est que pour la majorité, ça passe tout seul, comme par magie. 

Mais pour ceux chez qui ça persiste, l’orthophonie peut faire des miracles. Et même si le bégaiement reste, on peut enseigner aux jeunes qu’ils ont parfaitement le droit de s’exprimer à leur manière. 

Leur voix compte, leurs mots ont de la valeur. 

Et non, ça ne devrait jamais les empêcher de réaliser leurs rêves, que ce soit de devenir médecin, avocat, enseignant, ou n’importe quoi d’autre !

Le contact précoce avec l’orthophonie, ça peut littéralement transformer leur qualité de vie. 

Alors, pourquoi on n’en parle pas plus, surtout quand on sait que le bégaiement touche entre 2 et 4 % de la population, selon des études britanniques ? C’est bien plus répandu qu’on le pense, et pourtant, l’autisme, par exemple, reçoit beaucoup plus d’attention.

Le bégaiement, ça reste un mystère pour beaucoup, sous-discuté et mal compris. Et oui, l’accès à des services orthophoniques à jour et de qualité peut être un vrai casse-tête, non pas à cause d’un manque de bonne volonté, mais parce que les approches évoluent rapidement. 

Heureusement, de nombreuses orthophonistes maîtrisent les bases essentielles pour soutenir ces enfants, en leur montrant qu’on a le temps de les écouter et que ce qu’ils ont à dire est important. 

Mais n’empêche qu’en tant que société, on ne parle vraiment pas assez du bégaiement. 😔

On parle de Lewis Carroll (Charles Lutwidge Dodgson), de Sia, de Daft Punk, du Bitcoin… Mais le bégaiement ?

Pas vraiment. Et on parle encore moins du bégaiement masqué.

Toi, que penses-tu de tout ça ? Partage ton avis dans les commentaires ! 🤗

Si c’est un sujet qui te touche personnellement ou qui t’intéresse, tu peux consulter le site web d’Anny et celui de sa clinique d’orthophonie, la clinique Passage. Aussi, tu peux retrouver Anny sur Facebook.

Je t’invite aussi à consulter les épisodes 59 et 62 de L’orthophonie simplement, dans lesquels je parle du bégaiement.

catégorie :

Tu as aimé cet épisode ? 📌 Épingle-le sur Pinterest pour le retrouver facilement !

Découvre le bégaiement masqué : ses impacts, comment le reconnaître et comment soutenir ceux qui le vivent | L'orthophonie simplement - épisode 86
Découvre le bégaiement masqué : ses impacts, comment le reconnaître et comment soutenir ceux qui le vivent | L'orthophonie simplement - épisode 86
Découvre le bégaiement masqué : ses impacts, comment le reconnaître et comment soutenir ceux qui le vivent | L'orthophonie simplement - épisode 86

EN QUELQUES LIGNES